Prêts pour un novembre photographique à Paris?


« Une photographie n’est pas nécessairement un mensonge, mais ce n’est pas la vérité non plus. Il faut être prêt à saluer l’inattendu. » disait la regrettée Martine Franck à qui la Fondation Henri Cartier Bresson va consacrer  sa première exposition dans ses nouveaux locaux du Marais.

Que dire de mieux pour aborder toutes les propositions photographiques  de novembre à Paris! Mais il va falloir choisir et puis aussi prévoir de bonnes chaussures pour arpenter les allées et les lieux d’exposition.

Quelques repères et les propositions de l’image par l’image en toute subjectivité: 

Les Foires et festivals
Paris Photo

Mickalene Thomas Calder Series#2

Nous choisissons de vous proposer parmi les 167 galeries présentes quelques artistes sur lesquels nous avons attiré votre attention sur ce site et que vous retrouverez dans les allées riches en multiples découvertes et valeurs sûres portées par les professionnels présents au Grand Palais, du 8 au 11 novembre:

 

 

 

 

Baptiste Rabichon, lauréat de la Résidence BMW,  Oan Kim et la compositrice Ruppert Pupkin dont le livre « Digital after Love, que restera t il de nos amours ? » édité par la Fondation Swiss Life sort en avant première chez Actes sud, et puis Maia Flore, et Adrien Boyer.

 

 

Fotofever

César Ordóñez, Ashimoto (courtesy Fifty Dots Gallery).

Start to collect ? La foire propose de vous initier à la collection de photographies,  de rencontrer 100 galeries et éditeurs de plus de 20 pays différents, dont le Japon à l’honneur de cette nouvelle édition.
Et puis la découverte de trois jeunes talents sélectionnés lors du Young Talents Fotofever Prize, au Carrousel du Louvre, du 8 au 11 novembre.

 

 


a ppr oc he

Emmanuelle Fructus

Le jeune salon Approche sélectionne des artistes qui font appel à la photographie sur des supports non traditionnels et interrogent la photosensibilité. Les deux jeunes directrices vous plongeront tour à tour dans la mémoire collective, l’histoire de l’abstraction ou encore l’observation du réel, une invitation à un vrai jeu photographique !
Par exemple, les tableaux d’Emmanuelle Fructus, fabriqués à partir de découpages et collages dans des photographes anonymes; tels des suites de chiffres et de dates, ils parlent aussi de notre Histoire, celle des disparus, des rescapés et des vivants. Sur réservation du 9 au 11 novembre, dans  l’hôtel particulier Molière du 1er arrondissement.

 

Photo Saint Germain

Claudine Doury

Pour la 7è édition, le Festival propose une programmation trop riche pour la résumer. Vous voyagerez dans l’espace et dans le temps.  Il sera difficile de résister à aller à la rencontre des personnes photographiées par Claudine Doury,   il y a vingt ans le long du fleuve Amour,  à l’Académie des Beaux Arts et à la Galerie particulière. Vous imaginerez  Prague en 1945 avec la Topographie des ruines de Joseph Zudek au Centre tchèque.

 

Elsa &Johanna

Avec Elsa  &Johanna (Johanna Benaïnous et Elsa Parra) à la Galerie Marie Hélène de la Forest DIvonne, vous glisserez  avec les deux artistes  dans la peau de personnages observés dans la rue ou simplement imaginés au gré de leurs explorations urbaines. « A Couple of Them » .

 

Et bien d’autres merveilles à découvrir, du 7 au 24 novembre, des rencontres, des conversations, des signatures au rendez-vous rive gauche 

 

Les institutions

Dave Heath, Sesco, Corée, 1953-1954 © Dave Heath / Collection Archive of Modern Conflict, courtesy Howard Greenberg Gallery, New York, et Stephen Bulger Gallery, Toronto

 

Au BAL, la belle découverte de Dave Heath qui occupe une place singulière dans l’histoire de la photographie américaine.  « Influencé par Eugène W.Smith et par les maîtres de l’école de Chicago dont Aaron Siskind et Harry Callahan. Il ne peut être pourtant considéré comme un photographe documentaire ni comme un photographe expérimental. Sa photographie est avant tout une manière d’attester de sa présence au monde en reconnaissant en l’autre un alter ego absorbé dans ses tourments intérieurs » selon  Diane Dufour,  qui propose une nouvelle fois une exposition remarquable, Dialogues with Solitude,  impasse de la Défense Paris 18è.

 

Fondation Henri Cartier Bresson


Découvrir le nouveau lieu de la Fondation et contempler les images de Martine Franck devrait être un grand moment, 79 rue des Archives Paris 4è.

 

 

Jeu de Paume

The Dorothea Lange Collection, Oakland Museum of California. collection.

 

Dorothéa Lange, par son travail au profit d’institutions fédérales américaines,  a inlassablement  dénoncé les injustices sociales . Ses images au plus près des personnages photographiés constituent un documentaire social et artistique de la Grande Dépression, de l’immigration des années 40 qui font étrangement écho avec l’actualité. Les séries consacrées à l’internement des citoyens américains d’origine japonaise , archives militaires n’ont été publiés que depuis qu’en 2006. Elle a été la première photographe à bénéficier d’une exposition personnelle au Museum of Modern Art de New York en 1966. A voir sans faute place de la Concorde.

 

 

Pentti Sammallahti

 

Et puis il y a toutes les galeries qui proposent des programmes alléchants et que nous n’avons pas encore visitées…. A recommander déjà pour garder votre bonne humeur, le très poétique Pentti Sammallahti, galerie Camera Obscura, boulevard Raspail, Paris 14.

 

 

L’image par l’image vous souhaite de belles visites et découvertes !

 

« En ville » en Arles, avec Baptiste Rabichon et la Résidence BMW


BMW Art & Culture présente « En ville » de Baptiste Rabichon, septième lauréat de la Résidence BMW.

Le projet mené à bien par Baptiste Rabichon durant la Résidence BMW s’est déroulée pour la première fois à GOBELINS, l’école de l’image; publié dans un livre coédité́ avec les Éditions Trocadéro dans la collection BMW Art & Culture,  en vente aux Rencontres d’Arles, ce travail sera présenté dans une exposition personnelle pendant les Rencontres de la Photographie, Arles 2018 dont BMW est mécène pour la neuvième année consécutive.

Lauréat 2017 de la Résidence BMW  à GOBELINS, l’école de l’image à Paris, Baptiste Rabichon travaille sur l’expérimentation.
Au cours de déambulations parisiennes, il a photographié huit balcons, seul élément intérieur des appartements que les parisiens donnent à voir à l’extérieur. Ils deviennent les pièces centrales de son travail mais sont totalement transformés par le photographe qui intervient dans l’image à travers différents procédés, anciens et contemporains. Construits comme des tableaux, il tente, pour chacun d’entre eux de rendre l’harmonie qu’il a perçue lors de ses promenades dans Paris. Cette harmonie résidant sans doute dans cet enchevêtrement entre extérieur et intérieur, entre ce qui se donne à voir depuis la rue et ce qui se devine ou s’imagine et auquel il répond en imbriquant une multitude de techniques les unes aux autres.

Avec la série Albums, deuxième partie du travail réalisé en résidence, il construit une sorte de répertoire irréel de la ville. Les images de cette série s’apparentent plus aux songes qu’aux images obtenues en déclenchant l’obturateur de l’appareil. À l’inverse, le hasard peut aussi rendre l’expérience du monde et décrire l’étrangeté des choses… Baptiste Rabichon tente de faire coexister dans l’obscurité du laboratoire ces deux expériences contradictoires, l’une remplie de durées et d’instants, de souvenirs et de projections, l’autre immédiate et primitive.

 

Le livre publié aux éditions Trocadéro est le septième ouvrage de la collection BMW Art & Culture consacrée aux lauréats de la Résidence BMW. Préfacé par Vincent Salimon, Président du directoire de BMW Group France, il débute par une conversation entre Baptiste Rabichon et François Cheval, directeur artistique de la Résidence.

 

 

Durant l’exposition, le public pourra découvrir une vidéo réalisée pendant la Résidence par Fabrice Laroche, enseignant à GOBELINS, Amandine Rebuffet, Camille Dumarché, Ces deux étudiantes en troisième année du cursus photographie  à GOBELINS ont assisté l’artiste durant tout le processus de création et de production de son travail, s’inscrivant ainsi dans le dispositif de transmission décidé conjointement pas BMW et GOBELINS.

Exposition au Cloitre Saint Trophime  du 2 juillet au 23 septembre 2018, sous la direction artistique de François Cheval.

Contact
Maryse.bataillard@bmw.fr
mprangey@gmail.com

www.bmw.fr/artetculture
https://www.gobelins.fr/residenceBMW2017-en-ville

 

l’image par l’image conseille BMW 

Carte Blanche à Nicolas Krief

Nicolas Krief aime l’envers du décor.
Sur Instagram, il est « basckstage « dans les expositions parisiennes et c’est très réjouissant. Amusant, anecdotique mais aussi profond sur la relation de ces hommes et femmes qui accrochent les oeuvres avec tant d’attention et de  précision. A leur tour ils animent des scènes et font vivre la peinture et la sculpture. La production artistique est devenue objet de culte, les expositions des grand messes. Les accrochages sont des moments tenus secrets du public. Commissaires d’exposition, conservateurs, installateurs, socleurs, convoyeurs, restaurateurs, métiers de la monographie, scénographes, menuisiers, vitriers, gardiens de salle, régies des musées sont les acteurs de ces scènes liturgiques auxquelles nous fait assister Nicolas Krief dans les photographies de la série qu’il a initiée en 2010, dans une vingtaine d’ expositions parisienne.
« La photographie est une écriture » cite Nicolas Krief, « c’est assurément un langage ». L’image par l’image vous invite à le découvrir dans cette Carte blanche.

Nicolas Krief a répondu aux questions de l’image par l’image 

Quand et comment avez-vous commencé la photographie ?
Tôt !  A 13-14 ans je chinais les numéros du Magazine Photo aux marchés aux puces parisiens. Ce sont ces 200 premiers numéros de Photo (que j’ai toujours) qui ont forgé ma première culture photographique.
A 15 ans j’empruntais à mon père son Asahi pentax et son agrandisseur Krokus, et je prenais mes premières images, et ratais mes premiers tirages.
A 17 ans je m’offrais un reflex Pratika avec ma première paie d’été, que je troquais après quelques mois pour un Nikon FM, que j’ai toujours.
Et puis après des études d’Histoire, j’ai suivi une première voie professionnelle, heureuse, dans les nouveaux médias, et la photo restait une pratique personnelle. Mais en 2005, j’ai fait le choix de me consacrer exclusivement à la photographie. Je suis autodidacte.

Qu’est ce qui vous anime ?
A 20 ans, je découvrais avec les Mythologies de Barthes la possibilité d’une autre intelligence des signes de notre temps. La photographie telle que je cherche à la pratiquer prend du sens dans la mesure où elle contribue à cette meilleure intelligence du réel… en m’offrant simultanément un biais par lequel appréhender ce réel.
Le photographe américain Garry Winogrand a dit tout ça en un raccourci réjouissant qui m’accompagne souvent lorsque je photographie : « Le fait de photographier une chose change cette chose. Je photographie pour découvrir à quoi ressemble cette chose quand elle est photographiée. »
Formellement, j’aime la réécriture romanesque que permet la photographie des moments et situations et des expressions les plus triviales.

Comment en êtes-vous arrivé à réaliser ce travail sur le montage des grandes expositions ?
En 2010, le journal Le Monde me commande le portrait d’un des commissaires de la rétrospective Monet organisée au Grand Palais : la RMN me propose alors une carte blanche pour en suivre l’accrochage. Cette première carte blanche a conduit à d’autres, avec la RMN, puis, lors d’une longue et riche collaboration, avec le musée d’Orsay.

 Racontez-nous vos « Accrochages »
L‘extrême prévenance pour les œuvres, la technicité et la précision des gestes, donnaient une évidente théâtralité aux scènes auxquelles j’assistais.Plus encore, cette théâtralité, parce qu’elle était très codifiée, prenait les traits d’une véritable liturgie : des objets précieux et admirables, manipulés selon des règles et des procédés strictes pratiqués selon une ferme répartition des rôles par des spécialistes : j’ai eu très vite le sentiment qu’une véritable religiosité animait ces moments. La question de notre rapport à l’objet de musée m’apparaissait rapidement central, et mon regard s’est rapidement orienté ; Je voyais clairement s’opérer un phénomène de transsubstantiation : le musée intronisait l’objet exposé, comme objet culte, comme œuvre d’art ou de pop’art. Ainsi il m’est vite apparu que se jouait dans ces installations notre rapport à l’Art, au Sacré, un sacré toujours aussi prégnant dans notre monde sécularisé.

Pouvez-vous nous éclairer sur la façon dont vous travaillez sur ces chantiers d’installation ?
J’ai joui et je jouis encore d’une très grande liberté. Les motivations des musées concernés sont de disposer d’un travail d’artiste, d’un travail testimonial à verser aux archives de l’institution.
Ces accrochages constituant la partie finale de la production d’une exposition, ils se déroulent sur deux, trois semaines. Ces images sont donc le résultat de moments d’immersion : immersion dans un même lieu, immersion parmi un groupe constitué pour l’occasion.
Mes images, comme toute ma production documentaire, sont des instantanés. Pas de pose ni de mise en scène, pas d’éclairage d’appoint.

Vous répondez aussi à des commandes, quelle est votre relation avec cette pratique ?
Je vis la commande comme parfaitement complémentaire de mon travail personnel, et travaille avec la même tension. Elle impose un cadre de contraintes propre à chaque projet, qui aiguillonne le regard sans m’empêcher de laisser s’exprimer « ma» photographie.
Concrètement, pour parler d’ « Accrochages », je poursuis mon travail dans les musées dans le cadre de commandes de journaux et magazines, et de commandes corporate (événements culturels ou dans le domaine du luxe, visites privées,…) et d’institutions muséales (rencontres du public avec des œuvres, photos d’architecture, de scénographie,…)
Depuis le poste d’observateur qui est le mien, j’ai le sentiment que les décideurs sont encore nombreux dans les Institutions publiques et privées à considérer (à juste titre selon moi…) la photographie comme un vecteur de communication inégalé.

Qu’allez-vous faire de cette somme d’images ?
Je ne me lasse pas du sujet, et je crois aux vertus de la persévérance en matière de photographie documentaire : revenir à l’ouvrage encore et encore. Je la poursuis donc avec l’envie d’en faire un livre… et une exposition.

Quels sont vos autres projets ? / Sur quoi travaillez-vous en ce moment ?
Outre mon travail de commandes et mes immersions dans les coulisses des musées, je poursuis une monographie sociale et culturelle du monde rural en Sarthe : « Jours de fête » Je m’intéresse aux moments de sociabilité en milieu rural, à la culture qui s’y déploie – indépendante de la culture dominante sans pour autant s’ériger en contreculture – et aux enjeux sociaux locaux qui se jouent avec et durant ces moments.

 

Nicolas Krief vit à Paris, Il est  diplômé d’un troisième cycle d’histoire contemporaine.
Il collabore avec la presse nationale, pour laquelle il couvre des sujets sociaux, culturels, et économiques. : Le Monde, Paris Match, Ideat, Figaro Magazine, Télérama, … Comme photojournaliste, il est membre de Divergence Images.
Son travail a été montré dans plusieurs expositions:
« Le Voyage d’Olympia » (l’Olympia de Manet) – Exposition collective sur le thème du Voyage à l’abbaye de l’Epau, au Mans en 2016.
« Le Voyage immobile »  – Exposition collective sur le thème du Voyage à l’abbaye de l’Epau, au Mans en 2015.
« Accrochages » KAUNAS PHOTO festival, à Kaunas, Lituanie  en 2014.

http://www.nicolaskrief.com
https://www.instagram.com/nicolaskrief/

 

Carte Blanche à Charlotte Mano

Charlotte_Portrait0124Charlotte Mano est une exploratrice de l’image et de l’intime. Découvrir ses portraits qui  se révèlent au toucher de la main ou au séchoir électrique est une expérience très troublante. Son travail photographique se déploie autour de souvenirs de personnages, de paysages, de sensations, et ne cesse de questionner l’image : son pouvoir de représentation, de transparence, mais aussi ses propres limites. L’atmosphère est  contemplative et un brin nostalgique. Ses influences sont variées : de la littérature fantastique du XIXème siècle à la peinture symboliste et surréaliste chinoise contemporaine en passant par des photographes contemporains comme Oscar Muñoz. Elle dit de ses images que  « les sujets sont figés, intemporels, uniques et précieux, telle une véritable peinture. L’image par l’image a découvert son travail à GOBELINS, l’école de l’image avant de la revoir au festival Circulation(s) où elle expose actuellement, et espère vous faire découvrir un talent prometteur.

Charlotte Mano a répondu aux questions de l’image par l’image :

Quelles ont été vos débuts en photographie?

J’ai grandi dans un petit village dans le sud-ouest près de l’océan. Nous vivions constamment dehors avec mon frère et mes cousins. Nous n’allions pas au cinéma, la télévision et internet sont arrivés assez tard : la photographie également. Mon père avait acheté un caméscope pour nos prochaines vacances. Nous étions tous fascinés. Un après-midi où il travaillait, je le lui ai « emprunté » et j’ai commencé à me filmer nue dans la forêt derrière la maison. Je marchais et dansais dans le cadre et hors champs : j’étais naïvement fascinée par l’idée de la « capture » et de l’enregistrement que je garderai tout le temps près de moi. La suite fut plus prosaïque, mon père découvrit la vidéo et, choqué, m’interdit formellement d’utiliser sa caméra, brisa la cassette et je fus punie. J’ai mis beaucoup de temps à comprendre ce que j’avais pu faire de mal. A mes 18 ans, mon frère m’offrit mon premier appareil photo.

Qu’est ce qui vous anime ?

La conviction viscérale que j’ai des choses à exprimer avec la photographie. L’image est silencieuse, évocatrice et plurielle pour chacun qui la voit. Elle a ses propres secrets que moi-même j’ignore et que le visiteur me dévoile parfois lors de conversations. Elle a quelque chose de mystique : par le vocabulaire de la photo comme « médium » « miroir » « capteur » « révélateur » « chambre noire ». Elle m’échappe aussi parfois, comme une « chose » insaisissable qui se baladerait dans l’air. Exprimer mon univers intime, comprendre mes sentiments et les traduire en image, c’est-à-dire rendre visible l’invisible m’anime complètement. J’aimerais d’ailleurs beaucoup, outre mon travail personnel et de commande presse, partager mon expérience et ma passion de l’image dans des écoles. Enseigner ou faire des workshops est un objectif à court terme qui me rendrait très heureuse.

 Comment choisissez-vous vos thèmes photographiques ?

Ma sensibilité me pousse naturellement vers l’humain, l’intime et plus largement la représentation. Je photographie ma famille, mes amis, moi-même, en studio (lieu neutre) ou dans mon village d’enfance. Les évènements de ma vie sont très liés aux séries produites. La série « Portraire » dernièrement exposée à la Bnf montre mes amis tels des peintures, en grand format. Ils occupaient une grande place dans ma vie au moment des prises de vue : je voulais une représentation troublante pour eux. La série « Blind visions » images thermiques noires où le regardeur doit poser ses mains sur l’image pour dévoiler les portraits de ma famille. Famille volontairement aveuglée et à l’allure fantomatique, qui représente ma relation difficile avec eux : métaphore d’êtres errants ensemble, sans vraiment se connaître, où la place du regardeur est centrale : sans lui les images ne sont pas révélées et mon intime reste caché sous cette substance opaque noire. Bref, vie et photographie vont de pair. 

Pouvez-vous nous éclairer sur votre processus de création et leur réalisation ?

Il n’y a pas de règle dans le processus de création si ce n’est l’expérimentation. Je mets beaucoup de temps à trouver « le truc » qui exprimera au mieux mes images mentales. Le procédé thermique a mis un an à voir le jour car je ne trouvais pas la bonne combinaison chimique. Idem pour les voilages de la série « Portraire ». Je tiens à ce que tout soit fait à la prise de vue pour qu’elle devienne elle-même une expérience pour le modèle. Dans un studio par exemple, je tamise volontairement les lumières ou photographie dans le noir, je choisis des musiques spéciales pour que l’on entre dans une ambiance d’introspection. Photographier est pour moi de l’ordre du rituel.

Sur quoi travaillez – vous en ce moment ?

A la suite d’une invitation de la galerie du Château d’Eau de Toulouse, j’ai entamé en novembre dernier un programme d’initiative européenne qui met en relation les institutions, les curateurs et les photographes émergents. Son nom : PARALLEL – European Photo Based Platform (http://parallelplatform.org). Avec l’aide d’un curateur de renom (Alejandro Castellote – Photo Espana) j’ai donc entamé une nouvelle série « Thank you mum » qui traite de la relation fusionnelle d’une mère et sa fille lorsque celle-ci apprend qu’elle est atteinte d’une maladie incurable.

« Thank you mum » sera donc prochainement exposé au Format festival (Derby QUAD, http://www.formatfestival.com) en avril puis poursuivra sa route à Zagreb en septembre pour le festival international OrganVida .  Sans doute le projet photographique le plus important que je n’ai jamais produit.

Votre actualité ?
J’expose actuellement la série « Blind visions » au 104 durant le festival Circulations jusqu’au 4 mai. Et prochainement, à la Maison de la photographie de Lille, dans le cadre de la Bourse du Talent avec la série « Portraire ».

portrait-mano-charlotte

Après un double cursus de Lettres modernes et de communication culturelle, Charlotte intègre l’école des Gobelins où elle sort dans les majors de sa promotion en 2017. La jeune artiste a remporté la Bourse du Talent 2017 avec sa série “Portraire. Après l’avoir montrée dans  l’exposition Fragilités à la BNF (Paris) terminée le 4 mars, elle sera  visible à  la Maison de la Photographie (Lille) du 7 juin au 30 juillet.
Un catalogue retrace l’exposition collective, Bourse du talent , editions Delpire.

Festival Circulation(s) au Centquatre jusqu’au 6 mai
http://www.charlottemano.com

Carte blanche à Patrick Taberna

Copy of Wengen, Suisse, 2013Patrick Taberna regarde et nous montre sa famille, ses photographies sont intimes mais son écriture est légère, attentive et bienveillante. On ne reconnaît ni sa compagne, ni sa fille ni son fils qui sont pourtant toujours quelque part, suggérés ou présents, dans les images, récits de son histoire personnelle. « Ce que je veux, c’est plus suggérer que vraiment montrer ; j’aime bien  que mes images soient des petites graines semées dans la tête des gens et qu’elles s’épanouissent dans la tête de chacun « .
L’image par l’image  vous invite à rêver avec ces images pour aborder 2018 en douceur.

Patrick Taberna a répondu aux questions de l’image par l’image 

Quand et comment avez-vous commencé la photographie ?

J’ai commencé à m’intéresser à la photographie vers 14 ans.
Je vivais à Saint Jean de Luz et collectionnais des cartes postales. Je n’avais pas assez d’argent pour avoir un appareil photo mais j’ai quand même pu acheter le « Larousse Montel de la photographie ».
En 1981, j’ai eu un Canon AE-1 et prenais des photographies de ma copine, pour l’épater. Elle n’a pas été trop déçue des résultats car nous nous sommes mariés quelques années plus tard, ça m’a encouragé à continuer.
La photographie nous accompagne toujours, deux beaux enfants aussi.

Comment choisissez-vous vos thèmes photographiques ?

Je regarde autour de moi.
Mon travail est une sorte d’autobiographie dont les prises de vue sont réalisées en voyage, la plupart du temps. Ces 10 dernières années, durant lesquelles j’ai composé « L’arrière-saison », je suis passé par la « crise de la cinquantaine ». Une phase d’interrogation, de remise en question, qui s’est concrétisée par un retour au noir et blanc (mes jeunes années) et un changement de format.
En septembre 2016, qui marque la fin de cette période, je suis revenu en force au format carré et à la couleur.
Bref, ma vie et ma photographie sont fortement liées.

Qu’est ce qui vous anime ?
La certitude qu’il y a urgence car la vie, passe vite.
C’est un besoin de retenir, de préserver ce que le temps emporte.

Quelle vision avez -vous des marques aujourd’hui et de leurs relations avec la photographie ?
Pour une marque, une entreprise, l’image est primordiale pour exister sur le marché. Il faut qu’elle porte un univers immédiatement identifiable et qu’elle soit suffisamment forte pour se « démarquer » de la masse.
L’image est le lien entre une industrie et un être humain qui a besoin de rêver, d’assouvir un besoin de sécurité qui le pousse à appartenir à une communauté.

Répondez vous aussi  à des commandes, quelle est votre relation avec cette pratique ?
Cette année j’ai répondu à une commande sur l’initiative d’un ami, auteur et metteur en scène de Théâtre, Hugo Paviot. Ce projet, « Et crie moi…Demain !, » a été réalisé dans la ville de Vitry-sur-Seine, avec le soutien du Théâtre Jean-Villar, de la fondation SNCF et de la fondation d’entreprise La Poste.
J’ai réalisé une série assez différente de ce que je fais habituellement, de grands tirages noir et blanc, sur papier japon très léger avec personne dans les images, juste quelques phrases.
C’était intéressant car je suis sorti de ma zone de confort mais ça m’a valu quelques nuits blanches.

Votre actualité
J’ai exposé ma toute dernière série « L’arrière-saison » à la galerie Camera Obscura jusqu’au 30 décembre 2017.
En 2018, j’ai un projet d’exposition au Japon (Tokyo) à la galerie Tosei-Sha et une nouvelle représentation par la galerie Peter Fetterman (Santa Monica) aux Etats-Unis.

Patrick Taberna

Originaire de Saint Jean de Luz, Patrick Taberna commence à photographier lors de nombreux voyages en Europe, Asie, Moyen Orient, Etats-Unis, ‘l’usage du monde’, de Nicolas Bouvier, en poche.
Peu après son arrivée à Paris en 1987, il fréquente assidûment le Club des 30×40 animés par Jean Luc Lemaitre puis Francis Richard.
En 1997, il entreprend une exposition postale : ‘Passage en Ouest’. Parce qu’elles lui ont donné le goût du voyage et de la photographie, dix personnes recevront 37 photos chacune, à raison d’une par semaine. Cette aventure lui permettra notamment de correspondre avec Bernard Plossu et Robert Frank. Il rencontre d’ailleurs ce dernier en avril 1999.
Patrick Taberna est mention Fnac en 2000 avec ‘Nord magnétique’ , lauréat Fnac Paris en 2001 avec ‘Nos Italies’ et lauréat 2004 de la Fondation CCF devenue Prix HSBC pour la photographie avec ‘Au fil des jours’.

En savoir plus en écoutant l’interview de Patrick Taberna dans l’excellente émission Regardez voir sur France Inter, de Brigitte Patient le 20 novembre dernier :
Patrick Taberna : « Ce que je veux, c’est plus suggérer que vraiment montrer « 

www.patricktaberna.com
https://www.galeriecameraobscura.fr