. © Alejandro Cegarra
Nous avons un chance inouïe: vivre en démocratie et Visa pour l’image en est une preuve évidente ! Cette 36ème édition – une première pour l’image par l’image – permet de constater, une fois de plus, que le monde de la photographie, riche et multiple, propose une lecture du monde sans cesse renouvelée : 26 expositions de photojournalistes de toutes nationalités et six soirées de projections. Pas de thème particulier pour ce festival qui regarde l’actualité du monde entier, ses conflits, ses révoltes, ses violences, ses guerres mais aussi les crises sociales et climatiques, les sujets de société comme les Jeux Olympiques et des hommages à des personnes exceptionnelles du monde de la photographie.
Choisis par des jurys de professionnels, ces témoignages qui informent et alertent nous permettent de regarder, d’analyser, de comprendre les différents sujets, d’en débattre, de confronter nos points de vue, les commenter, évoluer dans nos idées grâce au courage et à l’engagement de ces témoins inlassablement engagés, souvent au péril de leurs vies.
Comme le dit le nouveau président du festival, Pierre Conte: « Début septembre, la ville de Perpignan devient la capitale de ce métier « légendaire », celui du photojournalisme. »
Son directeur, Jean-François Leroy, le défend avec constance et acharnement depuis de nombreuses années, attentif à aborder toute l’actualité, lors des expositions et des projections en assumant les choix éditoriaux des sujets y compris lorsqu’ils sont polémiques.
L’image par l’image propose, de façon tout à fait subjective, quelques images parmi les sujets proposés, et ne peut que vous recommander d’aller toutes les voir à Perpignan d’ici le 15 septembre.
Des femmes venues soutenir la candidature de l’ancien Premier ministre Mir Hossein Mousavi lors d’un meeting. Téhéran, Iran, 9 juin 2009. © Alfred Yaghobzadeh
Alfred Yaghobzadeh, grand reporter de guerre réalise ses premières photos sur les événements tragiques que traverse son pays, l’Iran, lorsque la révolution islamique éclate en 1979. il consacre dès lors sa vie à couvrir les grands drames humains de notre époque.
Cette exposition présente des photos extraites du livre Alfred’s Journey, qui retrace près d’un demi- siècle de grands reportages pour préserver une partie de la mémoire du monde. Entre horreur est beauté de certaines images, une vie de documentation sur les conflits et les révolutions la violence et la folie des hommes sans limites.
Un migrant sur un train de marchandises appelé « La Bête » à son arrivée en ville. Piedras Negras, Mexique, 8 octobre 2023.
© Alejandro Cegarra
« Emigrer c’est comme se séparer en deux, c’est comme laisser un pied dans le pays que l’on a quitté et l’autre dans l’incertitude » dit Alejandro Cegarra. Cette image exprime très fortement cette idée développée dans la série Les deux murs. Depuis 2019, les politiques migratoires du Mexique ont radicalement changé. Nation historiquement ouverte aux migrants et demandeurs d’asile à sa frontière sud, le Mexique applique désormais des mesures d’immigration draconiennes. Des barrières ont été dressées pour durcir les politiques migratoires, fermant des portes autrefois ouvertes à ceux qui en ont le plus besoin. Cette image est particulièrement expressive.
Foyer des comédiens, juste avant d’entrer en scène pour La Mort de Danton, de Georg Büchner, mise en scène de Simon Delétang.
© Jean-Louis Fernandez
Jean-Louis Fernandez est passionné par le spectacle vivant. La Comédie-Française lui a ouvert ses portes pour qu’il pose son regard sur la vie de sa Troupe née en 1680 et toujours en ébullition. Avec son exposition « Comédie française : histoires de théâtre« , il nous offre un témoignage formidable sur le processus de création, des premières répétitions jusqu’à la naissance du spectacle, du plateau aux coulisses et aux loges. Un témoignage sur ces temps supendus, captés avec pudeur, hors des regards des spectateurs. Le choix des situations, les cadrages et les lumières subliment les personnages entre réalité et fiction.
L. (12 ans, à droite) avec sa sœur C. (9 ans) qui n’a pas encore de « vrai » smartphone mais peut faire semblant grâce à des appareils factices de constructeurs chinois de smartphones.
© Jérôme Gence
Avec « Grandir dans la cour d’écrans », Jérôme Gence plonge dans le quotidien des enfants dont le temps quotidien d’exposition aux écrans a explosé depuis la crise sanitaire. La généralisation du télétravail et des cours en ligne, la numérisation des rapports humains et des divertissements en sont les principales causes. Pour ces jeunes ultra-connectés, cette évolution n’est pas sans conséquence sur leur santé, leur développement psychique et leur sécurité face notamment aux risques de cyberharcèlement et de mauvaises rencontres.
Kebedesh (38 ans) et sa fille (11 ans). Elles ont été attaquées chez elles au Tigré le 28 décembre 2020 par quatre soldats érythréens qui ont violé Kebedesh et jeté de l’eau bouillante sur sa fille pour qu’elle arrête de crier. Adwa, Tigré, Éthiopie, 23 décembre 2023.
© Cinzia Canneri, Lauréate du Prix Camille Lepage 2023
Le corps des femmes comme champs de bataille
Cinzia Canneri documente la question de l’atteinte systématique au corps des femmes dans la guerre et s’est concentrée sur la guerre du Tigré qui a éclaté en 2020.
Les experts en droits de l’homme des Nations unies ont accusé toutes les parties impliquées dans ce conflit d’atrocités, dont certaines qualifiées de crimes contre l’humanité. Les forces armées érythréennes ont utilisé les violences sexuelles comme arme de guerre contre les femmes, punissant les Erythréennes pour avoir fui leur pays, et cherchant à exterminer les Tigréennes. Le titre de l’exposition dit toute l’épouvante du sujet que la photographe réussit à traiter avec une telle humanité…. qu’elle nous permet de regarder … leurs corps sont devenus des champs de bataille.
René, éleveur à la retraite, vivait dans des conditions extrêmement difficiles. Il a vécu l’appauvrissement progressif de sa profession et savait que son monde était en train de disparaître. Puy-de-Dôme, 2016.
© Pierre Faure / Hans Lucas
Le titre France périphérique fait référence au livre très commenté du géographe Christophe Guilluy. Le photographe, Pierre Faure, a documenté la pauvreté en France depuis 2015 et nous propose ce corpus intense. Il a consacré entre douze et dix-huit mois à chaque région; une durée qui lui permet d’établir des relations de confiance avec les personnes. La rencontre de l’autre y est essentielle. Sa matière photographique est la condition humaine et c’est là qu’il nous touche profondément. La série a reçu le Visa d’or des Solidarités
Mayotte. Moissi (22 ans), sans travail depuis qu’il a obtenu son bac, a souhaité faire le service militaire adapté (SMA) pour pouvoir passer son permis poids lourd, formation qu’il n’aurait jamais eu les moyens de financer lui-même.
© Miquel Dewever-Plana
Miquel Dewerre-Plana a documenté, pour le Figaro magazine, le régiment du service militaire adapté (RSMA), un dispositif de l’armée française réservé aux Outremers, et créé en 1988 à Mayotte. Ce sujet Mayotte: sous le drapeau, le parcours de la deuxième chance, plutôt optimiste, nous informe de ce dispositif qui permet de lutter contre l’échec scolaire et le taux record d’illettrisme qui réduisent drastiquement les opportunités de s’en sortir. Plus d’une vingtaine de formations sont ainsi proposés dans des métiers particulièrement recherchés à Mayotte, allant des métiers du bâtiment ou de la sécurité au transport routier, en passant par la restauration, l’administration, ou encore la menuiserie et la métallerie.
www.visapourlimage.com