Photographe passionnée par les rencontres qui guident son travail, Lola Reboud touche les spectateurs par la relation qu’elle tisse avec les sujets qu’elle aborde. Le fil conducteur de sa démarche photographique est celui qu’elle entretient avec le climat. La géographie comme les cycles des saisons y est aussi important que les individus.
Composées de portraits et de paysages, ses séries ne sont pas illustratives des changements climatiques tels que rapportées habituellement par les médias. Sensible à la manière de traiter le sujet de l’environnement par des sensations évoquées dans des scènes de vie, l’image par l’image vous propose une rencontre avec la photographe et quelques images de la série 180 km après la mer que nous vous proposons de découvrir et contempler.
Lola Reboud a répondu aux questions de l’image par l’image
Comment avez-vous commencé la photographie ?
Vers 15/16 ans, je photographiais mon quotidien avec un compact Olympus que j’empruntais à ma mère, sans aucune intention particulière, si ce n’est faire des albums souvenirs. Pour mes 18 ans, mon père m’a offert un Nikon FE et j’ai installé un labo noir & blanc dans ma salle de bain d’étudiante. Puis lorsque j’ai intégré la section photo-vidéo aux arts déco, mon père ( encore !) m’a donné son Hasselblad. Le format carré est devenu mon 2eme œil. Je m’en sers encore, bien que le numérique a aujourd’hui largement pris le dessus dans ma pratique et que ce format carré ne soit (malheureusement) pas développé par les industries de la photographie.
Qu’est ce qui vous anime?
Les rencontres !
Avec les personnes, avec des univers que la photographie me permet de découvrir. La photographie est aussi l’occasion d’aller vers l’autre et le portrait en photographie produit cet espace de rencontre. L’art a été aussi une rencontre pour moi et c’est l’univers visuel avec lequel je dialogue.
Comment choisissez-vous vos thèmes photographiques?
J’ai commencé avec la sérieLes Climats, c’est une recherche au long cours, qui a commencé par une rencontre avec la ministre de l’environnement d’Islande et qui m’a sensibilisée au sujet. Elle se poursuit encore aujourd’hui, au Japon puis en Corse.
Pour une carte blanche photographique, comme par exemple la Jeunesse en France, commanditée par le ministère de la culture, il y avait un cahier des charges mais j’étais autonome dans le choix du lieu et des situations, et la figure de la jeunesse déjà présente dans mon travail résonnait avec cette commande.
Pouvez-vous nous éclairer sur votre processus de création et leur réalisation ?
Il n’y a pas vraiment de règles. Je trouve mes images dans la réalité puis je procède par mise en situation avec mes modèles. Je ne suis pas une photographe de studio, mon atelier se trouve dans le monde. Mais le travail de recherche en amont est tout aussi important. Aujourd’hui je m’associe aussi avec des chercheurs dans d’autres disciplines que la mienne selon les projets et cela peut produire des formes parfois inattendues. Echanger avec des géographes, des volcanologues, des océanographes me permet de voir et de comprendre le monde à travers leur prisme. Je ne ferai sûrement pas attention au même paysage si je n’étais pas orientée par leurs connaissances et leur perception.
Vous effectuez aussi des commandes, quelle est votre relation avec cette pratique ?
Elle est essentielle parce que c’est un exercice appliqué pour poser mon regard sur le monde. Quelque soit le type de commande il s’agit toujours de photographie, et c’est le métier que j’ai choisi. Ce sont généralement des commandes où j’ai «carte blanche » ou bien des portraits.
Quelle vision avez-vous des marques et de leur relation avec la photographie ?
Les marques utilisent constamment l’image, elles aiment et ont besoin d’images et en particulier de photographies pour communiquer. Les réseaux sociaux, instagram par exemple aujourd’hui, ont encore plus démocratisé les types d’images et leur médiatisation. Une marque se diffuse sur de plus en plus dans des supports variés et une photographie postée sur Instagram n’aura pas tout à fait la même force visuelle que dans un magazine papier, une campagne d’affichage dans le métro, ou qu’une publicité au cinéma. Les supports, les spectateurs sont de plus en plus divers et les registres photographiques le deviennent aussi. . Je reste observatrice de ce que les entreprises produisent.
Vous effectuez aussi un travail photographique de commandes … appréciez-vous aussi cette approche plus orientée « corporate » ?
Oui ! Il y a quelque chose d’enthousiasmant à travailler avec une équipe.
Pour ma part il s’agit souvent de commandes où je suis plutôt autonome dans ma proposition, il me semble que cet espace est tout aussi enrichissant pour le photographe que le commanditaire. Cela laisse aussi un espace de sensibilité et de relationnel qui m’importe. Le principal enjeu est celui de concilier la demande de l’entreprise et mon propre travail, car c’est moi qui photographie dans les deux cas.
Qui est Lola Reboud?
Lola Reboud est née en 1982. Après l’obtention d’un D.N.A.P. aux Beaux Arts de Cergy et d’un master en Esthétique à la Sorbonne, elle intègre l’école Nationale Supérieure des Arts Décoratifs (E.N.S.A.D) de Paris en Photographie. Elle complète sa formation à New York, en 2008 au sein de l’agence Magnum Photo et y assiste les photographes Elliot Erwitt et Alec Soth. Puis en 2011 elle assistera une année Yto Barrada, à Tanger.
Son travail est exposé en France et à l’étranger et notamment au CentQuatre, ParisPhoto, Galerie du jour-Agnès b., Nooderlicht photofestival, Photaumnales, la Box-Bourges, Kyotographie, CCO Art Center Osaka, musée Nicéphore Niépce, CACP villa Pérochon, Festival Images Singulières, Collection Yvon Lambert (…).
Membre du studio Hans Lucas, elle réalise aussi des commandes et des portraits pour la presse
Mention spéciale au Prix Photolevallois pour Les Climats I (Islande), la bourse pour la photographie documentaire du CNAP lui permettra de réaliser Les Climats IIau Japon, et qui sera publié aux éditions Poursuite. Elle participe à l’expédition TARA méditerranée puis en 2017, à la commande photographique coordonnée par le ministère de la culture Jeunes générations.
Son actualité
Une exposition de la série Les Climats II (Japon) en avril, à l’Institut Français de Kyoto puis en novembre une exposition au festival PhotoLux à Lucca en Italie.
Elle fait partie du programme de thèse de création avec l’ENSP, qui donnera lieu à une exposition d’ici 3 ans.