Carte blanche

Carte blanche à Fred Delangle et Ambroise Tézenas

Haroun

« J’ai 24 ans et je viens du Tchad. Avec ce manteau, je me sens sur un pied d’égalité pour trouver du travail, ou étudier! Quand tu viens chez quelqu’un, je trouve que c’est normal de t’adapter à la manière dont il vit »
Haroun – extrait de Des sneakers comme Jay-Z

Un soir d’hiver, Zaman, un jeune afghan – arrivé en bermuda et en tongs après avoir marché seize mois depuis Kaboul –, s’est présenté au vestiaire de l’association Emmaüs Solidarité à Paris. Il a demandé à Valérie Larrondo, bénévole depuis 2016, sans trop y croire si par hasard, dans le tas de tennis usagées qui lui étaient présentées, il n’y aurait pas plutôt une paire de baskets « des baskets pas moches….Des sneakers comme celles de Jay Z ». L’idée du projet est partie de là.  Avec un vidéaste et quatre bénévoles, deux photographes de renom, Fred Delangle et Ambroise Tézenas, ont cherché à en savoir plus sur le rôle de leurs vêtements. « Ceux qu’ils portent et qui ont appartenu à d’autres. Ce qu’ils représentent pour eux. En quoi ils dénoncent, en quoi ils trahissent ou en quoi ils protègent – et pas juste du froid et de la pluie. »  Sensible à ce travail « Des sneakers comme JAy-Z » découvert lors d’une projection au CentQuatre à Paris et aux Rencontres d’Arles,  à l’engagement bénévole des deux photographes qui n’ont plus rien à prouver, l’image par  l’image vous propose pour les voeux rituels de bonne année, un travail sensible, respectueux du sujet traité en soutien à Emmaüs Solidarité.


Fred Delangle et Ambroise Tézenas ont répondu aux questions de l’image par l’image 

Pourquoi cet engagement auprès de Emmaüs Solidarité ?
Nous avons fait un travail de citoyens, conscients que l’attente était forte, celle de l’association mais aussi des personnes photographiées, et que nous ne pouvions pas les décevoir.
Nous avons choisi de travailler à deux, avec un seul appareil, une chambre photographique 4×5 avec laquelle nous travaillons souvent l’un et l’autre. C’est un outil qui impose une certaine distance et un temps particulier lors des prises de vue.

Nous avons cherché à éviter que la signature photographique de l’un ou de l’autre soit reconnaissable mais que le résultat soit à la hauteur de la sollicitation qui nous était faite.

Le projet a duré 3 mois. Il a été mené sous la forme d’un portrait et d’un texte qui accompagne chaque image. Ces paroles des exilés sont indissociables du travail photographique, elles permettent de témoigner et de comprendre l’importance du vêtement pour ces hommes hébergés dans le centre de premier accueil de la Porte de La Chapelle aujourd’hui fermé.

Vous êtes bénévoles mais ce projet était une sorte de commande, comment l’avez -vous vécu?
Avec enthousiasme et le sentiment qu’il y a une responsabilité lorsque l’on se  confronte à de tels enjeux. Il était indispensable que le projet serve d’une part le propos avec justesse et que les frais inhérents au projet puissent être couverts.
Dès le début l’association Emmaüs s’est engagée et a avancé des fonds pour que nous puissions produire les premières images avant de trouver des partenaires, certaine que le projet allait forcément attirer les regards et les soutiens. Des lieux d’exposition et de festivals ont participé à la diffusion (le CentQuatre, Nantes, Arles), le laboratoire Janvier, l’agence de communication Mazarine et l’agence de publicité Australie et aussi des entreprises comme Uniqlo, EKHO Conseil et Alter Eco ont contribué au succès de cette initiative.

Vous effectuez ainsi des commandes, en dehors de vos projets personnels, quelle est votre relation avec cette pratique ?
Cela peut être très enrichissant de travailler pour les entreprises, qu’elles soient commerciales, publiques ou privées, chacune avec sa logique. Et si nos projets personnels sont au cœur de nos préoccupations artistiques, les commandes représentent notre quotidien, la photographie est notre métier.

Ambroise:  Quand je réponds à certaines commandes, je me sens faire partie de l’entreprise,  j’agis avec enthousiasme tout en essayant de faire des propositions créatives qui dépassent le cadre strict défini par mon client. Je suis heureux quand elle me suit. La commande c’est un cadre, une contrainte et c’est ce qui m’intéresse. Je mets ma pratique, mon regard à son service.
Fred : Je suis porté par mon projet qui me tient à coeur jusqu’à trouver la solution photographique la plus satisfaisante pour le client et moi-même. J’aime aussi repousser ma pratique dans de nouvelles expérimentations lorsque cela m’est permis par l’entreprise. Etonnamment, les clients apprécient les propositions qui les surprennent et sortent du cadre !

Quel est votre enjeu en tant que photographe quand vous effectuez ces travaux de commande?
Fred: pour moi l’enjeu principal est de mettre mon regard au service d’un cadre qui m’est proposé. J’aime faire des allers retours entre mes séries personnelles et le travail de commande. D’une façon générale, j’ai besoin d’inventer pour avancer.
Ambroise: ce que je recherche avant tout,  c’est l’équilibre entre satisfaire l’entreprise et mon écriture photographique qui est à priori la raison pour laquelle on m’a passé la commande. Je mène en parallèle  travail personnel et commande. L’un complète l’autre, tant sur le plan  financier que sur celui de de la narration. Le travail personnel appelle la commande qui enrichit le premier.

Qui sont les photographes?

Ambroise Tézenas

Fred Delangle

Ambroise Tézenas et Frédéric Delangle développent à la fois un travail de commande et un travail personnel sur le paysage et les effets de la mondialisation et de l’urbanisation sur l’homme. Auteurs de plusieurs livres monographiques, ils ont choisi pour le projet « Des sneakers comme Jay-Z » de réaliser leurs images ensemble avec une seule chambre photographique. Le projet vient de remporter le Premier prix de la commande photographique décerné par le Ooshot Award qui distingue des images conçues pour des commandes créatives ainsi qu’une mention spéciale du Prix Camera Clara.

Ambroise Tézenas est né à Boulogne-Billancourt en 1972; Frédéric Delangle, à Suresnes en 1965. Ils vivent et travaillent à Paris. Ils se sont rencontrés dans les locaux du tireur qui travaillait sur les projets Ahmedabad, no life last nighten Inde de Fred Delangle et de Pékin, théâtre du peuple en Chine d’Ambroise.  Leur relation est tout autant professionnelle qu’amicale.

Film de Sylvain Martin

http://www.ambroisetezenas.com/

http://www.fredericdelangle.fr/

Contact presse – achat de catalogues – commande d’images de cette série au profit d’Emmaüs Solidarité
sabrinaponti123@gmail.com

Publication vendue 10 € au profit d’Emmaüs Solidarité
https://www.dessneakerscommejayz.fr/

Don Emmaüs Solidarité

 

Partage sur les réseaux sociaux


Tous les articles de la rubrique "Carte blanche"

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *