Marion Gronier est une photographe de conviction et d’émotion. Elle choisit un sujet et le travaille méthodiquement avec toute sa passion et sa patience. Ses choix ne sont pas dictés par une mode ou la facilité. La rigueur de son travail et l’exigence qu’elle s’impose tant dans les prises de vue que pour ses tirages en font à mes yeux un exemple.
Marion Gronier a répondu à nos questions:
Comment choisissez-vous vos thèmes photographiques, sont ils purement dictés par votre émotion ou y a-t-il quelque chose de rationnel comme l’intérêt que pourra y trouver le public, un musée, une galerie ou un éditeur ?
Mes choix sont dictés par mon envie de travailler sur un sujet. Cette envie émerge sans réflexion, elle peut être provoquée par quelque chose que je vois – ou plutôt quelqu’un puisque je photographie essentiellement des gens – et qui me saisit, me captive ou par la découverte de personnes qui me semblent incarner un sujet qui m’habite.
Ce n’est que dans un second temps, une fois le travail terminé, que je démarche des lieux d’exposition (musées ou galeries), des éditeurs ou des magazines pour leur montrer mon travail et le faire exposer ou publier.
Vous n’avez pas effectué jusqu’alors de travail « corporate », seriez-vous prête à travailler pour des marques sous forme d’une commande et quel serait alors votre enjeu ?
Mon travail est très personnel, comme je viens de vous l’expliquer, il m’est donc difficile de m’imaginer travailler en commande. En définitive, je crois que cela me fait un peu peur d’être soumise aux attentes de quelqu’un d’autre, de devoir remplir des exigences qui ne sont pas les miennes. Mais cette peur est peut-être fantasmatique, un fantasme de diabolisation du commanditaire qui étoufferait les prétentions artistiques d’un auteur, qui réduirait son travail à des préoccupations de marketing, qui souhaiterait des images formatées, aseptisées ou racoleuses. Néanmoins, je me dis souvent que ce serait pour moi un défi d’accepter une commande et de la mener à bien. L’enjeu serait alors d’arriver à ce que mon commanditaire souhaite les mêmes photographies que moi. Soit qu’il m’ait choisi pour que je traite sa commande à ma manière, soit que j’arrive à lui faire aimer ma façon de photographier. Et qu’à la fin il soit satisfait du résultat !
Quelle relation voyez-vous entre les marques et la photographie ?
Je pense que les marques auraient beaucoup à gagner à faire travailler des artistes. Nous sommes envahis par des images photographiques toutes identiques, lisses, invisibles en définitive. Des photographies réalisées par des auteurs sortiraient du lot, elles auraient forcément plus d’impact parce qu’elles se démarqueraient par rapport aux normes en vigueur.
Après des études littéraires, Marion Gronier choisit la photographie et se consacre à ses projets personnels qui creusent la figure humaine.De trois séjours de plusieurs mois en Asie – Chine (2005), Inde (2007) puis Japon (2008) – elle rapporte des portraits d’acteurs de théâtres itinérants, photographiés dans les coulisses.Ce travail a été exposé au Théâtre de Nîmes en 2006, à la galerie Hudson Éditions à Paris en 2007, au Festival Chroniques Nomades à Honfleur en 2009 et à la Biennale Internationale de l’Image de Luang Prabang, Laos, en 2010.Invitée en résidence à l’Atelier De Visu à Marseille en 2009, elle réalise des portraits de Gitans sédentaires. D’autres séjours suivront pour approfondir ce travail.Parallèlement, elle commence un travail, encore en cours, de portraits d’artistes de cirques itinérants.Mais je crois que les marques sont souvent frileuses, les budgets et les enjeux pouvant être très importants, elles préfèrent ne pas prendre de risque, alors qu’elles auraient beaucoup à y gagner.
Dernière série achevée à ce jour, des portraits en diptyques de petits filles participant à des élections de mini-miss et de leur mère. Ce travail sera exposé au Musée de la Photographie de Charleroi du 24 septembre 2011 au 15 janvier 2012 et un livre sera publié aux Editions Images en Manoeuvre (sortie 6 octobre 2011).
www.mariongronier.com